J3eA 5 (2006)
DOI : 10.1051/j3ea:2006019
Automatisation dun banc de mesures
(application
aux réseaux électrocinétiques et à lalgèbre linéaire)
P. LAGONOTTE
I.U.T. de Poitiers,
Département GEII
Résumé : Nous présentons
dans ce document un projet traité en enseignement dIUT deuxième année, et qui
est relatif à la conception et à la mise en uvre dun banc de mesures
informatisé. La partie logicielle est programmée sous LabVIEW,
et la partie matérielle correspond à une centrale de mesure de type Agilent 34970A équipée dune carte multiplexeur 20 voies (Agilent 34901A), et dune carte de matrice de commutation
4x8 (Agilent 34904A). Une liaison par bus GPIB permet
de relier les deux parties qui forment alors un banc de mesures informatisé. Lapplication
pratique au contrôle de la valeur des éléments dun réseau de résistances est
décrite aussi bien au niveau de la partie câblée que de la partie programmée.
Lensemble de ce projet formant un sujet suffisamment simple, ambitieux
et cohérent.
Mots Clés : algèbre
linéaire, centrale de mesures, programmation LabVIEW,
informatique industrielle, Bus GPIB/IEEE 488-2, traitement de linformation,
projet détude et de réalisation.
1. Introduction
Dans le cadre dun projet de deuxième année dI.U.T. de génie électrique (option automatique), il nous a
paru intéressant détudier lautomatisation dun banc de mesures et le
traitement possible des informations issues de mesures. Cette automatisation
fait appel à des connaissances diverses et variées : programmation sous LabVIEW, utilisation de drivers dinstruments, Bus IEEE
488-2, fonctionnement dune centrale dacquisition et des différentes cartes
pouvant y être associées, raccordement et câblage.
La durée dun projet étant limitée à neuf séances de
quatre heures, il nest pas toujours facile de trouver un sujet suffisamment
simple, ambitieux et cohérent. Le problème de la détermination des éléments
dun réseau de résistances sy prête bien. Cest la mise en uvre de ce banc de
tests et de mesures que nous souhaitons ici vous présenter.
Sur les neuf séances du projet quatre sont consacrées
à une initiation à LabVIEW à laide dexercices : manipulation des
chaînes de caractères, manipulation des nombres (booléens, entiers, réels,
complexes), manipulation des tableaux (matrices) et clusters (groupement de
données), structures (condition, séquence, for, while),
et laffichage de mesures ou de résultats sous forme graphique.
Une séance est consacrée à la résolution mathématique
du problème de la détermination des éléments du réseau de résistances, présentée
dans [1].
Les mesures sont effectuées de manière manuelle, linversion matricielle est
dans un premier temps effectuée à laide de calculatrices, et dans un second temps
programmée sous LabVIEW.
Trois séances sont consacrées à lutilisation de
« drivers » dinstruments, au pilotage dinstruments par une liaison
RS232 et GPIB, et à la mise en uvre matérielle et logicielle du banc de
mesures.
La dernière séance correspond à un contrôle individuel
de projet de deux heures (en deux séries de six étudiants).
2. La conception d'un banc de mesures
Un banc de mesures est constitué des trois
parties :
-
des
instruments de mesures contrôlables par une interface informatique, et qui
effectuent lacquisition de linformation ou la délivrance de signaux
appropriés ;
-
des
communications (RS232, RS485, GPIB-488, USB, LAN,
.) qui permettent de
transmettre ou déchanger des informations ;
-
dun
programme informatique qui donne de manière séquentielle des ordres aux
différents instruments, afin que ces derniers soit
établissent des signaux soit renvoient les mesures effectuées, et qui effectue
le traitement des diverses informations reçues.
Le programme informatique a donc un rôle de chef
dorchestre entre les différents instruments intervenants, son rôle est
fondamental dans le fonctionnement et la gestion de tels systèmes.
2.1. Les aspects logiciel et programmation
Actuellement différents langages de programmation peuvent
être utilisés pour le contrôle dun banc de mesures. En plus des classiques
C/C++ et VisualBasic sécrivant avec de classiques
lignes de code, un certain nombre de langages ont été développés pour faciliter
la gestion des entrées-sorties (RS232, RS 485, GPIB, USB, LAN, fichiers disque
dur), ainsi que la mise au point et la gestion dune interface graphique de
type superviseur (écran, souris, clavier). Nous citerons entre autre TestPoint 4.0 [2] ; Agilent
VEE PRO 7.0 [3] ; LabWindows 7.0 ; LabVIEW 7.0 [4] [5] . Ces logiciels
ont été développés par des constructeurs dinstruments, respectivement Keithley, Agilent (anciennement Hewlett-Packard) et National Instruments pour des besoins
de contrôle de leurs appareils.
Présentation et initiation à LabVIEW
LabVIEW est un logiciel qui permet de configurer des
instruments, piloter des manipulations, recueillir et traiter des données.
Toute application LabVIEW est appelée un instrument
virtuel (Virtual Instrument : VI). Pour
chaque instrument, ou bus, ou carte dacquisition, il existe une bibliothèque
de programmes de configuration qui fournit la face avant de linstrument et
convertit les commandes et les mesures.
Un
instrument de mesure classique peut se décomposer en quatre parties logiques :
- la première
partie réalise la conversion d'une grandeur physique en signal électrique
(exemple d'une thermistance et de son alimentation). C'est le conditionnement
des signaux ;
- la seconde
partie réalise la mise en forme de cette grandeur électrique quelconque en une
grandeur électrique exploitable par des circuits électroniques ;
- la troisième
partie est constituée des circuits électroniques de traitement et/ou d'analyse
(exemple du calcul du spectre fréquentiel d'un signal) ;
- la quatrième
partie réalise l'affichage des résultats (exemple du tube cathodique d'un
oscilloscope, ou des afficheurs numériques d'un voltmètre) et permet de changer
les paramètres de l'instrument (exemple du potentiomètre réglant l'échelle de
visualisation sur l'écran de l'oscilloscope).
De
même, un instrument de mesure informatique va se décomposer suivant quatre
parties :
- une première
partie identique à la précédente mais réalisée par des circuits spécifiques de
mise en forme des grandeurs physiques en une tension exploitable (exemple : 0-5
V), c'est ce que font les cartes de conditionnement de signaux (SCXI,
...) ;
- la seconde
partie convertit ces signaux électriques mis en forme en une grandeur numérique
et stocke ces valeurs dans la mémoire de l'ordinateur (cartes de conversion
analogiques/numériques) ;
- la troisième
partie traite et analyse ces valeurs numériques, ce travail est réalisé par le
logiciel ;
- la quatrième
partie affiche les résultats sur l'écran de l'ordinateur, et permet de changer
les paramètres de l'instrument grâce à la souris ou au clavier. Ce travail est
également réalisé par le logiciel.
On appelle "instrument virtuel" l'ensemble
composé des troisième et quatrième parties de l'instrument. Avec LabVIEW, on pourra manipuler ces instruments virtuels comme
s'il s'agissait d'instruments réels : on pourra par exemple tourner un
potentiomètre (virtuel puisque c'est une image de potentiomètre) grâce à la
souris ou bien visualiser une courbe sur une portion de l'écran représentant un
oscilloscope.
Le « Tutorial LabVIEW »
en français fourni avec le logiciel [4] (en version pdf)
est bien fait, permet un autoapprentissage et donne
des idées pour une série dexercices progressifs avec les étudiants. Une autre
solution consiste à utiliser louvrage de référence de Francis Cottet [5]. Faire un cours sur LabVIEW dépasserait toutefois le cadre de ce document.
Dautres informations précieuses au sujet des différents bus dinstrumentation [6],
du bus GPIB ou IEEE 488 [7] et des pilotes dinterfaces NI-VISA [8]
sont disponibles sur le serveur de National Instrument.
Le
choix dun langage de programmation
Généralement le langage de programmation utilisé fait
parti de la culture dune entreprise, dun établissement ou dun laboratoire. Le
choix dun langage de programmation nest en général plus à faire puisquil a
été fait de manière très antérieure, et est généralement imposé pour tout nouveau
projet. Cest également le cas au département G.E.I.I. de Poitiers, où LabVIEW avait été introduit en T.P. dautomatique par
Dominique JACOB quelques années auparavant, et où le logiciel sous licence est
disponible.
Le langage LabVIEW est très
répandu dans lindustrie. Son succès vient du fait que :
-
pour
arriver à vendre ses instruments, un fabricant doit être en mesure de proposer
des « drivers LabVIEW » correspondant à ses produits et
permettant leur mise en uvre facile et rapide par ses clients.
-
National
Instruments encourage les fabricants dinstruments à développer des « drivers LabVIEW » afin que LabVIEW puisse
très facilement commander un ensemble dappareils de marques hétérogènes.
Cependant la concurrence entre fabricants est sévère dans
lindustrie de linstrumentation. National Instruments propose gratuitement des
drivers LabVIEW pour les appareils dAgilent, alors quAgilent vend
ses instruments avec des bibliothèques pour son logiciel Agilent
VEE.
Dautre part, la compatibilité au niveau dun PC entre
un langage de programmation de haut niveau dune marque et des cartes
dinterface dune autre marque nest pas forcément assurée au niveau des
bibliothèques de liens dynamiques (fichier.dll). Aussi, il est sage de rester
dans un univers informatique dont la cohérence est validée par un même et
unique fabricant.
Le choix de programmer avec LabVIEW
apparaît être en phase avec les développements industriels actuels, et ce dautant
plus que nos étudiants nont pas eu loccasion dutiliser un langage de
programmation graphique (Langage G).
2.2.
La centrale de mesures
La
centrale de mesures Agilent 34970A
La centrale de mesures 34970A (Figure 1) est devenue
un classique de lindustrie du fait de son coût très abordable et de ses
nombreuses possibilités [9]. Elle se compose d'une unité centrale à
trois logements avec un multimètre numérique à 6 chiffres ½ incorporé. Le
multimètre numérique interne assure le conditionnement, l'amplification (ou
l'atténuation) des signaux et leur conversion analogique-numérique
avec une résolution jusqu'à 22 bits.
Fig. 1. Le châssis de la centrale de mesures Agilent 34970A (faces avant et arrière)
Les bornes de raccordement à vis sur les cartes
suppriment lusage de borniers extérieurs. De plus un
dispositif compte toutes les fermetures des commutateurs afin dassurer une
maintenance fiable et prévisible des relais. Les entrées ou sorties dune carte
introduite dans le slot 1 sont numérotées à partir de ladresse 100, à partir
de ladresse 200 pour le slot 2, et à partir de ladresse 300 pour le slot 3. Il
est possible de choisir parmi huit modules enfichables pour créer un
enregistreur de données compact, un système d'acquisition de données complet,
une unité de commutation économique ou un automate de contrôle de processus
industriels.
Les huit modules disponibles permettent de réaliser
les fonctions suivantes :
- 34901A Carte multiplexeur
à 20 voies (2/4 fils) Scrutation 60 voies/s. Des voies à deux et quatre fils
peuvent être configurées sur le même module. Deux entrées supplémentaires
protégées par fusible (22 voies au total) acheminent un courant jusqu'à 1 A
vers le multimètre numérique interne, ce qui permet des mesures de courant c.a. et c.c. sans recourir à des
"shunts" (résistances en dérivation) externes.
- 34902A
Carte multiplexeur à 16 voies (2/4 fils) Scrutation 250 voies/s. Le module 34902A
emploie des relais "reed" pour obtenir des
fréquences de balayage pouvant atteindre 250 voies par seconde pour la centrale
Agilent 34970A. Ce module convient aux applications
de tests automatisés à débit élevé, ainsi qu'aux tâches d'enregistrement et de
surveillance des données à grande vitesse.
- 34903A Carte commutateur /
Actionneur universel, 20 voies. Il peut être utilisé pour alimenter des équipements
sous test, des voyants témoins ou actionner des relais externes et des
solénoïdes. Associé à d'autres modules Agilent 3490xA
de matrice et de multiplexeur, il permet de construire des systèmes de
commutation personnalisés. Ses contacts 300 V, 1 A peuvent accepter jusqu'à 50
watts, ce qui est suffisant pour de nombreuses applications de commutation de
puissance.
- 34904A Carte de
matrice 4 x 8. Des rangées ou colonnes de matrices peuvent être
connectées entre 2 ou 3 modules Agilent pour
construire des matrices 8 x 8, 4 x 16 ou plus, en ayant jusqu'à 96 points de
croisement dans un seul châssis 34970A.
- 34905A
Carte double multiplexeur RF 2 GHz 1:4 voies, 50 ohms. Il peut par exemple acheminer
des signaux entre le dispositif à tester et les instruments tels que le
générateur de signaux, oscilloscope, analyseur de spectre. Les multiplexeurs RF
sont disposés en tant que deux multiplexeurs 1 x 4 indépendants, chacun ayant
un blindage commun et un conducteur central commuté. Les connexions peuvent
s'effectuer directement sur les entrées SMB avec une bande passante utilisable
de 2 GHz ou sur des adaptateurs BNC-SMB fournis avec une bande passante de 1
GHz. Plusieurs groupes de voies peuvent être connectés en cascade pour des
applications nécessitant des topologies encore plus grandes, pour créer un
multiplexeur 16:1 sans adaptateur dans un même châssis.
- 34906A Carte double multiplexeur
RF 2 GHz 1:4 voies, 75 ohms. Identique au 34905A mais en 75 ohms dimpédance.
La carte multiplexeur à 20 voies : Agilent
34901A
La
carte 34901A est le multiplexeur polyvalent pour le balayage de voies par la
centrale Agilent 34970A. Ce module est divisé en deux
rangées de dix voies chacune pour différentes mesures à deux fils (Figures 2 et
3). Chaque voie peut être configurée indépendamment des autres sans avoir besoin
dun conditionnement spécifique du signal. Les différentes configurations de
mesure possibles sont :
- température (thermocouple, RTD ou
thermistance). Le module 34901A comporte un bloc isotherme intégré de référence
de température pour réduire les erreurs lors de mesures par thermocouple ;
- tension (continue ou alternative
jusqu'à 300 V) ;
- courant (continu ou alternatif
jusqu'à 1 A). Deux voies supplémentaires protégées par fusible (ce qui porte à 22
le nombre de voies au total) supportent un courant jusqu'à 1 A et sont reliées
au multimètre numérique interne, ce qui permet des mesures de courants
alternatif et continu sans recourir à des shunts externes. En cas de recours à
un shunt (résistante de précision et de puissance) externe, lappareil est
configuré en millivoltmètre ;
- fréquence et période jusqu'à 300 kHz ;
- résistance (sur deux ou quatre fils
jusqu'à 100 MW). Une mesure de résistance deux fils mesure en plus
de la résistance de lélément les résistances des fils nécessaires au câblage
qui sont non négligeables dans le cas où lélément à mesurer est de faible
résistance. La méthode à quatre fils est utilisée pour mesurer des résistances
de faible valeur dans toutes sortes d'applications, particulièrement pour les
valeurs inférieures à 10 W, ainsi que dans les mesures qui nécessitent une grande
précision, comme les mesures de résistance détectrice de température (RTD).
Lorsque lappareil est configuré en mesure de résistance à quatre fils,
linstrument apparie automatiquement les voies n en injection de courant
et n +10 en mesure de tension. Des voies à deux et quatre fils peuvent
être configurées sur le même module.
Fig. 2. Les mesures de résistances à deux fils et à
quatre fils
Fig. 3. Schéma de principe de fonctionnement de la
carte 34901A
Fig. 4. La carte 34901A avec ses relais et ses borniers de câblage
La carte commutateur à matrice 4x8 : Agilent 34904A
Le
module 34904A contient 32 points de connexion pour deux fils disposés entre
quatre lignes et huit colonnes daccès (Figures 5 et 6). Il est alors possible
deffectuer toutes les combinaisons possibles entre une entrée et des sorties, ce
qui permet à différents instruments d'être connectés en même temps à de multiples
points sur un équipement sous test. Cette carte nest pas raccordée au
multimètre interne de la centrale 34970A.
Chaque
relais de point de connexion est adressable individuellement pour une opération
de fermeture ou douverture. Lidentification du relais se fait à partir des
numéros de ligne et de colonne, par exemple la voie 41 correspond au relais de
connexion de la quatrième ligne et de la première colonne.
Il
est possible de fermer simultanément plusieurs voies dun module, mais dans ce
cas faire bien attention aux risques de court-circuit.
Fig. 5.
Schéma de principe de fonctionnement de la carte 34904A
Des
lignes ou colonnes de matrices peuvent être connectées entre 2 ou 3 modules
pour construire des matrices 8x8, 4x16 ou plus, en ayant jusqu'à 96 points de
croisement dans un seul châssis 34970A.
Fig. 6. La carte 34904A avec ses relais et ses borniers de câblage
2.3. Les principales
difficultés
Une erreur généralement commise par les étudiants est
doublier que linformation circulant sur les liaisons est identique à celle de
lélectronique (analogique ou numérique 2 états). Si lon veut éviter tout
conflit, il faut toujours et obligatoirement avoir un seul et unique générateur
au niveau dune liaison (figure 7).
Fig. 7. Système mono-source
et multi-récepteurs
Une autre difficulté concerne le passage de
linformation dans les structures à laide de variables locales de séquence. La
figure 8 présente le passage de linformation du bus dadresse et du bus
derreur aux sous VI contenues dans les différentes étapes dune structure
séquence. Nous pouvons remarquer la différence de câblage entre la première
séquence, la dernière séquence et les séquences intermédiaires.
Fig. 8. Lutilisation de variables locales de séquence
Enfin une dernière difficulté concerne en cas de
commande de plusieurs appareils interfacés, lutilisation de plusieurs bus
dadresse (un par appareil de mesure) avec un seul bus derreur. La structure
de principe du diagramme est présentée figure 9.
Fig. 9. Structure dun programme multi instruments
3. Application pratique
3.1. Rappel sur lobjectif de lapplication
Pour mettre en pratique les notions de programmation
dune centrale de mesure sous LabVIEW, nous
présentons ici un projet facile à mettre en uvre. Lobjectif est de déterminer
les valeurs dun ensemble de résistances sans avoir la possibilité daccéder
individuellement à chaque élément. Cette situation se présente concrètement
lorsque des résistances ont été assemblées sur un circuit imprimé, et que lon
souhaite effectuer un test ou une vérification des composants en fin
dassemblage.
Les notions théoriques relatives à
un réseau électrocinétique maillé qui permettent à partir de mesures dimpédances
dentrée et datténuation de déterminer la valeur de chaque composant sans
avoir à déconnecter chaque élément du montage pour effectuer une mesure
individuelle sont présentées dans une précédente partie « Réseaux
électrocinétiques et algèbre linéaire (notions fondamentales) » [1].
Pour simuler et concrétiser cette situation, nous
disposons dune boîte Plexo comportant un réseau de
résistances dont les accès sont reliés à des bornes de connexion vers lextérieur
(Figure 10).
Fig. 10. La boîte Plexo
et les bornes daccès au réseau
La topologie de ce réseau à quatre nuds correspond à
celle de la figure 11.
Fig. 11. Le réseau maillé de
conductances considéré
Lobjectif est de déterminer les
valeurs des dix résistances constituant le réseau à partir de simples mesures
au niveau des bornes daccès. Les résistances ne sont pas accessibles
individuellement pour effectuer des mesures à lohmmètre. Cependant, il est
possible de mesurer la résistance dentrée entre chaque nud du réseau et le
nud de référence. Dautre part, en appliquant une tension entre un nud du
réseau et le nud de référence, il est possible de mesurer latténuation de
cette tension aux autres nuds.
Lensemble des mesures nécessaires à
la détermination de la valeur de toutes les résistances peut être effectué de
manière manuelle comme lors de travaux pratiques détudiants. La matrice des
conductances de ce réseau à 4 nuds est de dimension 4x4, soit 16 éléments.
Mais comme cette matrice est symétrique, il ny a en réalité que 10 inconnues à
déterminer, soit le même nombre que le nombre de résistances à calculer. Cependant,
lors dun processus de fabrication en milieu industriel les mesures et leur
traitement sont généralement automatisés. Cest cette automatisation qui fait
lobjet de ce projet.
3.2. Mise en uvre matérielle
Les centrales de mesures sont très utilisées dans
lindustrie et dans les laboratoires de recherche, mais beaucoup plus rarement
lors de classiques enseignements en EEA. Ce projet est loccasion pour les
étudiants de découvrir ce nouveau type de matériel. Dans le banc de test que
nous avons développé (Figure 12), la centrale de mesures Agilent
34970A occupe une place centrale entre le PC et le montage que nous
retrouverons au niveau du câblage et de la liaison informatique.
Fig. 12. Synoptique du banc de test développé
Nous devons effectuer la mesure de la résistance
dentrée par rapport au nud de référence successivement aux quatre nuds du
réseau.
Nous devons pouvoir appliquer une tension
successivement à chaque nud du réseau et mesurer les atténuations de cette
tension en tous les autres nuds. La matrice de commutation permet dappliquer
la tension de lalimentation à successivement tous les nuds du réseau.
Disposant de 20 voies sur la carte 34901A, nous
souhaitons éviter toute reconfiguration de voies lors du processus de mesure. Nous
souhaitons également minimiser le câblage à effectuer, et qui est généralement la
principale source de défaillance des systèmes. La figure 13 présente le câblage
effectué et le choix de la configuration des différentes voies, lignes et
colonnes.
Fig. 13. Le schéma de câblage entre les cartes 34901A et
34904A, lalimentation et la boîte Plexo
Le déroulement des différentes mesures est alors le
suivant :
Pour i = 1 à 4 :
- Fermeture du relais n°10+i, carte
34904A.
- Mesure de limpédance dentrée au
nud i mesure résistance (rii), voie
n°1 carte 34901A.
- Ouverture du relais n°10+i, carte
34904A.
- Fermeture du relais n°20+i, (application
dune tension continue de 9 V entre les nuds i et 0).
- Fermeture du relais n°30+i, carte
34904A.
- Mesure de la tension au nud i
mesure tension (DVi), voie n°2 carte 34901A.
Pour j = 1 à 4 :
- Fermeture du relais n°40+j, carte
34904A.
- Mesure de la tension au nud j
mesure tension (DVj), voie n°3 carte 34901A.
- Calcul du terme Rij
de la matrice, soit : Rij =
rii. DVj/ DVi.
- Ouverture du relais n°40+j,
carte 34904A.
Fin boucle j.
- Ouverture du relais n°30+i,
carte 34904A.
Fin boucle i.
Le diagramme du sous-programme LabVIEW
correspondant à cette séquence de mesures est présenté figure 16. La
position des cartes dans les slots de la centrale est paramétrable.
Une mesure de la température peut être facilement
effectuée au niveau de la voie n°4 carte 34901, afin de garder une trace
des conditions de mesure.
Notons que si les cartes et le câblage sont dédiés à
un banc spécifique de mesures, la centrale peut très facilement se déplacer
entre différents bancs par le simple désenfichage des
cartes.
Notons également la très bonne documentation en
français de la centrale Agilent 34970A [9], et soulignons
le grand intérêt pratique de la partie 8 de ce document consacrée aux
« Techniques de mesure ».
3.3. Mise en uvre logicielle
La figure 14 présente la face avant réalisée sous LabVIEW. Les matrices intermédiaires de calcul sont
présentées afin de vérifier le bon fonctionnement du sous programme de mesure.
La matrice [R] doit en effet être positive, symétrique et avoir une diagonale
prépondérante.
Le programme est paramétrable au niveau de la
liaison (RS232 ou GPIB), ainsi que le
nombre de nuds du réseau maillé. Les cartes 34901A et 34904A sont également
interchangeables au niveau des 3 slots de la centrale 34970A et leur position
paramétrable au niveau du programme.
Fig. 14. La face avant du programme sous LabVIEW
La figure 15 présente le diagramme du programme
principal. Linversion matricielle est directement réalisée par un sous
programme disponible avec la version LabVIEW 6.
utilisée.
Fig. 15. Le diagramme du programme principal sous LabVIEW
La figure 16 présente le diagramme du sous-programme
« Mesure Matrix » effectuant toutes les
mesures et construisant la matrice des résistances [R]. Il est nécessaire de
fermer les relais de la carte commutateur à matrice avant toute mesure et de
les ouvrir après.
Fig. 16. Le diagramme du sous-programme « Mesure Matrix »
Le programme est constitué par deux boucles
« for » imbriquées, la première effectue la mesure de limpédance
dentrée aux quatre nuds du réseau, ainsi que la mesure de la tension
appliquée. La seconde boucle mesure la tension résultante aux autres nuds et
calcule les éléments de la matrice de résistances [R].
Nous avons essayé de rendre ce programme paramétrable
au niveau du nombre de nuds du réseau et de limplantation des cartes 34901A
et 34904A dans les différents slots de la centrale 34970A.
Il va de soit quun programme nest jamais fini, car
il peut toujours être complété par des fonctionnalités nouvelles comme la
sauvegarde sur fichier des résultats avec la date et lheure de la mesure,
ainsi que par exemple la température ambiante.
4. Conclusion
Ce sujet de projet est très simple en apparence, mais
il est en fait très formateur, car il fait appel à des connaissances diverses
et variées devant se combiner pour arriver à un système opérationnel.
Cette étude permet une première approche des systèmes
linéaires maillés, tout en ne faisant appel quà des notions supposées connues.
Les notions fondamentales contenues dans [1], sont
présentées aux étudiants lors de ce projet pour effectuer le traitement de
linformation après les mesures.
Ce projet permet également de découvrir lutilisation
dappareils de mesure au travers dun bus dinstrumentation et de sa
programmation. Ce projet très concret permet deffectuer une initiation à la
programmation sous LabVIEW dinstruments de mesure à
laide de drivers développés pour la mise en uvre rapide de systèmes
industriels.
Un système dinstrumentation est souvent réalisé par
lassemblage de différents matériels de marques hétérogènes, mais dont le
fonctionnement est parfaitement orchestré au niveau informatique, est une
réalité industrielle. Le choix dun instrument de mesure nest plus uniquement
lié à sa précision et à son coût, mais il est de plus en plus lié à son
interfaçage et aux logiciels pouvant faciliter sa mise en uvre.
5. Références
[1] P. LAGONOTTE, Y.
EICHENLAUB, Réseaux électrocinétiques et algèbre linéaire (Notions Fondamentales),
Revue J3EA.
[2] Site TestPoint : http://www.test-point.com
[3] Agilent
VEE Pro http://we.home.agilent.com/FRfre/nav/-12247.536883294/pd.html
Agilent VEE Pro Users guide http://cp.literature.agilent.com/litweb/pdf/E2120-90011.pdf
et Agilent VEE Pro Advanced programming techniques http://cp.literature.agilent.com/litweb/pdf/E2120-90002.pdf
[4] LabVIEW, Manuel de lutilisateur, Édition
de Janvier 2002, Référence 321190D-01 (au format .pdf
et livré avec les CD de LabVIEW)
[5] F. COTTET, LabVIEW programmation et applications, Collection EEA série
automatisme, ed. DUNOD.
[6] National
Instrument, « L'utilisation des nouveaux bus
dans le Test et la Mesure » http://digital.ni.com/worldwide/france.nsf/main?readform
[7] National Instrument, Le GPIB (IEEE 488) http://www.ni.com/products/gpib/f/
[8] National
Instrument, NI-VISA
: le standard de l'instrumentation sous LabVIEW http://digital.ni.com/worldwide/france.nsf/main?readform
[9] AGILENT
TECHNOLOGIES, Guide dutilisation Agilent 34970A
Unité dacquisition de données/commutation.
Biographie
de lauteur :
Patrick LAGONOTTE
I.U.T. de Poitiers, Département HSE, 8 rue Archimède, 79000
Niort
Laboratoire dEtudes Thermiques, UMR CNRS n°6608, ENSMA, BP
40109, 86961 Futuroscope Cedex, France.
Tel : 05-49-49-81-23 Fax :
05-49-49-81-01 Email :
lagonotte@let.ensma.fr
Ancien élève de lEcole Normale
Supérieure de Cachan, professeur agrégé de Génie Electrique en 1984, Docteur de
lInstitut National Polytechnique de Grenoble en 1987. Il est Maître de
Conférences à luniversité de Poitiers depuis 1988 où il enseigne
lélectrotechnique et est auteur dun ouvrage sur les installations
électriques. Il effectue ses recherches au Laboratoire dEtudes Thermiques de
lENSMA de Poitiers. Ses principaux domaines de
recherche sont la modélisation des systèmes, la thermique des machines
électriques, le refroidissement des semiconducteurs
de puissance, les équations de diffusion et de propagation, la modélisation des
systèmes dordre non entier ou dordre infini, la caractérisation des systèmes
électrochimiques.